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Hétéroptères de Guadeloupe - Projet Karuet 2022

Lors de son appel à projet scientifique de 2021, le Parc national de la Guadeloupe, soutenu par France Relance  a subventionné 7 projets sur des thématiques bien différentes : insectes, ophiures, mollusques, oiseaux etc. Découvrez ici les résultats de l'un de ces projets : le projet Karuhet portant sur les hétéroptères.

 

Chez les insectes, on retrouve l’ordre des hémiptères (Hemiptera) dans lequel se trouve le sous-ordre des hétéroptères (Heteroptera). Les hétéroptères sont plus communément appelés punaises. 43 900 espèces ont été décrites jusqu’à présent dans le monde.

L’association ZICRONA – association française des hétéroptéristes – a lancé le programme KARUHET 2022 pour améliorer les connaissances sur les punaises en Guadeloupe. Ce programme est mis en place dans le cadre d’une actualisation des données sur ces espèces d’insectes. Quelle est la diversité de l’hétéroptérofaune de Guadeloupe ?

Un petit mot sur les hétéroptères

Les punaises sont des insectes à métamorphose incomplète c’est-à-dire que leurs larves et leurs nymphes ressemblent plus ou moins aux adultes. Les punaises sont les seuls hémiptères à posséder des ailes antérieures partiellement dures. Ceci leur permet d’une part de voler avec leur 4 ailes et d’autre part de se protéger des agressions physiques des prédateurs et du milieu lorsqu’elles sont au repos.

La plupart des espèces de punaises ne se nourrissent que de liquides ; ce sont principalement des opophages c’est-à-dire des buveuses de sève. Effectivement, elles sont munies d’un appareil buccal piqueur-suceur. Leurs mâchoires et leurs pièces buccales se sont allongées et transformées en stylets fins et longs de plusieurs millimètres. Elles se servent de leur salive pour pénétrer facilement une surface avant de pouvoir y aspirer des nutriments.

Par ailleurs, le sous-ordre des hétéroptères se divise en 7 infra-ordres : Nepomorpha, Gerromorpha, Dipsocoromorpha, Enicocephalomorpha, Leptopodomorpha, Cimicomorpha et Pentatomomorpha.

Pour finir, les données sur l’hétéroptérofaune qui concernent la Guadeloupe – où seulement 108 espèces de punaises environ ont été répertoriées – sont pauvres en comparaison des données de France – où environ 1360 espèces ont été recensées.

Comment s’y prend-on ?

Le recueil de données pour le programme KARUHET 2022 s’est fait de 3 manières différentes : l’analyse de la bibliographie, l’étude des collections d’hétéroptères de Guadeloupe et les prospections sur sites.

Dans un premier temps, la bibliographie permet de recueillir toutes les informations existantes sur les hétéroptères de Guadeloupe. Ces informations peuvent provenir de catalogues et de notes qui concernent la Guadeloupe, de mentions dans des travaux de classification taxonomique, et également de moteurs de recherche.

Les collections entomologiques de Guadeloupe constituent une autre source d’informations sur les hétéroptères . Néanmoins, le manque d’efficacité de cette méthode est le reflet de ces collections trop peu nombreuses ou dont la section qui concerne les hétéroptères est pauvre.

Enfin, des prospections ont été effectuées dans 17 communes de Guadeloupe. D’un côté, un entomologiste menait sur différentes zones de l’archipel un inventaire entomologique de 2019 à 2022 tandis que de l’autre, 5 autres entomologistes et 3 aide-naturalistes se sont mobilisés pour la mission KARUHET 2022 qui s’est déroulée sur 2 semaines sur la Basse-Terre en janvier 2022. Plusieurs outils et techniques ont été utilisées à cette occasion : parapluie japonais, filet troubleau, filet fauchoir, piège lumineux, chasse à vue.

Autant de méthodes sont utilisées au vu de la diversité de la faune hétéroptérique en général.

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Le parapluie japonais/la nappe de battage permet de capturer les insectes tout en permettant de connaître les plantes dont ils proviennent. Cependant, les insectes risquent de s’envoler rapidement.
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Le filet troubleau sert à capturer les espèces aquatiques.
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Le filet fauchoir permet de capturer les insectes mais ne permet pas de savoir de quelle plante ils proviennent.
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Le piégeage lumineux permet d’attirer les individus avec une source de lumière artificielle.
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La chasse à vue/au sol/au gant Matocq/le tamisage permet de repérer à l’œil les punaises cachées sur le sol. Les gants Matocq protègent des plantes épineuses.

Résultats du programme Karuhet

La mission KARUHET 2022 a permis de prospecter 278 stations dans 28 sites différents et de bancariser les données d’hétéroptères de 691 stations en y incluant la bibliographie et les collections.

Au terme du programme KARUHET 2022, une liste de 250 espèces d’hétéroptères trouvés en Guadeloupe a été établie. 163 ont été recensés avec la bibliographie, 14 avec les collections d’insectes et 151 avec les prospections de la mission Karuhet 2022. Voici le nombre d’hétéroptères observés par infraordre :

  • Nepomorpha : 17
  • Gerromorpha : 13
  • Dipsocoromorpha : 1
  • Enicocephalomorpha : 3
  • Leptopodomorpha : 2
  • Cimicomorpha : 79
  • Pentatomomorpha : 135

En tout, 87 nouvelles espèces de punaises ont été découvertes. Parmi elles, Vannius dusoulieri n. sp. est une nouvelle espèce de l’archipel qui a été décrite par Armand MATOCQ et Jean-Claude STREITO.

Des 250 hétéroptères recensées, 29 sont endémiques de la Guadeloupe et 2 autres sont subendémiques. Il reste tout de même des punaises dont le taxon est encore en cours de vérification.

En résumé, le programme KARUHET 2022 qui a mobilisé l’association ZICRONA, des entomologistes et des naturalistes a permis d’améliorer les connaissances sur les punaises (Heteroptera) de la Guadeloupe. Des méthodes d’investigation variées aussi bien dans la bibliographie que sur le terrain ont abouti à une liste de 250 espèces de punaises présentes sur l’archipel dont 87 qui n’avaient pas été signalées. Les résultats du programme KARUHET ont mis en exergue l’efficacité et l’intérêt des recherches menées car les connaissances sur les hétéroptères de l’archipel ont nettement augmenté avec sa mise en œuvre. Cette liste représente ainsi une avancée considérable dans le domaine de l’hétéroptérofaune guadeloupéenne et incite à continuer les recherches pour consolider ces connaissances et étayer les données sur l’écologie hétéroptérique.

Références citées :

DUSOULIER F. & JOURDAN, T. (2022) – Programme KARUHET 2022 : contribution à la connaissance des hétéroptères de Guadeloupe et éléments de synthèse. Rapport Zicrona pour la Direction régionale de l’Environnement, de l’Aménagement et du Logement (DEAL) de Guadeloupe, le Parc national de la Guadeloupe, et PatriNat (OFB/CNRS/MNHN), Basse-Terre/Saint-Claude/Paris. 59 p.

MATOCQ A. & STREITO J.-C., 2022. – Une nouvelle espèce du genre Vannius de l’île de la Guadeloupe (Hemiptera, Miridae, Cylapinae, Vanniini). Bulletin de la Société entomologique de France, 127 (3) : 301-304.

 

Retouvez tous les rapports des APS du Parc national : https://www.guadeloupe-parcnational.fr/fr/des-connaissances/les-missions-scientifiques/les-rapports-scientifiques/les-rapports-des-appels

frnace relance