Ce projet vise à réaliser un bilan de l’impact de la maladie corallienne « Stony Corals Tissue Loss Disease » ou maladie de la perte de tissu corallien (SCTLD) sur les récifs de Guadeloupe. Cette étude portait sur quatre sites : les Îlets Pigeon, la pente externe de la barrière du Grand Cul-de-sac marin, la Passe-à-Colas et le large de Port-Louis. Elle a permis de comparer les coraux présents avant la maladie en 2019 et en 2022 après son arrivée.
C’est quoi la SCTLD ?
C'est une maladie corallienne apparue en Floride en 2014. Après s’être étendue sur les côtes de la Floride, la maladie a envahi la région caraïbe à partir de 2017, avant d'être découverte en Guadeloupe en mai 2020.
D’après les scientifiques, cette maladie serait d’origine bactérienne, car elle répond à un traitement antibiotique, mais à ce jour, on ne sait pas exactement quel est le pathogène responsable de cette maladie. La maladie se transmet principalement par les courants marins via des particules flottantes, en contact direct entre les colonies ou par contamination des sédiments marins.
La maladie s’attaque aux algues symbiotiques des coraux ainsi qu’aux tissus en laissant de grandes marques blanches. Le corail meurt généralement dans les jours ou les semaines qui suivent son infestation.
Quels coraux sont impactés ?
Il existe dans la Caraïbe 70 espèces de coraux Scléractiniaires, c’est-à-dire de coraux durs. 51 de ces espèces étaient présentes en 2019 sur les récifs étudiés. Parmi ces 51 espèces, 27 ont été affectées par la maladie, soit 52 % des espèces. Il s’agit là d’un pourcentage élevé quand on sait qu’habituellement les maladies coralliennes touchent un petit nombre d’espèces de coraux. La SCTLD, quant à elle, impacte un large éventail d’espèces de coraux.
Toutes les espèces de coraux ne réagissent pas de la même manière à la maladie : sept espèces de coraux sont particulièrement sensibles et ont disparu des récifs étudiés en 2022. Il s’agit de : Meandrina Jacksoni, M. meandrites, M. danae, Dichocoenia stokesi, Dendrogyra cylindrus, Eusmilia fastigiata et Isophyllia rigida. 20 autres espèces sont en forte régression.
A l’inverse certaines espèces semblent être insensibles à la SCTLD, notamment les genres Acropora (3 espèces) et Porites (6 espèces) alors que par le passé, ils se sont révélés sensibles à d’autres maladies coralliennes.
Quelles sont les conséquences à long terme ?
Sur les sites étudiés, entre 8 et 38 % des espèces ont été affectées par la maladie. Chez les colonies malades, entre 36 et 72 % des tissus sont atteints. Au total, la perte en couverture corallienne est comprise entre 10 et 39 % selon les sites. Cette perte en coraux est la plus importante depuis l’épisode de blanchissement corallien de 2005.
Les dernières observations réalisées en janvier 2023 sur les récifs de la Guadeloupe ont montré que la SCTLD était toujours latente. Plusieurs stratégies de lutte ont été proposées : retirer les colonies touchées, traiter à l’aide d’antibiotique ou encore restaurer les récifs avec des espèces résistantes aux maladies, mais pour l’instant aucune ne semble possible à mettre en œuvre.
La propagation de cette maladie corallienne ne semble pour l’instant pas affecter les poissons des récifs, ni en nombre ni en taille, ni dans la diversité des espèces présentes.
Cela peut s’expliquer notamment car les poissons de récifs ont surtout besoin des coraux pour leur habitat, c’est l’architecture complexe des récifs qui leur sert de lieu de vie. Comme la maladie n’as pas encore impacté cette architecture, les poissons ne semblent pour l’instant pas impactés.
Cependant, parmi les 27 espèces disparues ou en forte régression se trouvent des coraux structurant des récifs, des espèces « clé de voûte ». Ces régressions sont susceptibles, à terme, d’affecter la capacité d’accueil du récif et donc les poissons et autres habitants des récifs.
Source : Bouchon, De Lavigne, Cordonnier et Bouchon-Navaro, 2023, Bilan de l’impact de la maladie corallienne « Stony Corals Tissue Loss Disease » (SCTLD) sur les récifs coralliens de Guadeloupe.
Découvrez le rapport de cette étude et des autres projets soutenus par le Parc national ici : https://www.guadeloupe-parcnational.fr/fr/des-connaissances/les-missions-scientifiques/les-rapports-scientifiques/les-rapports-des-appels