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Miconia calvescens : comment lutter contre ce "cancer vert" qui se propage ?

 Originaire d'Amérique centrale et d'Amérique du Sud, Miconia calvescence fait partie de la liste des 100 espèces les plus invasives au monde. Dans son écosystème d’origine, le cortège d'espèces associé à cette plante permet une régulation naturelle de l'espèce, une composition qui est absente de nos forêts insulaires de Basse-Terre. Cette condition couplée à l'humidité importante de la zone, lui permet de se reproduire abondamment et de facilement coloniser l'espace.  

On doit sa découverte à un agent du Parc national de la Guadeloupe en mars 2020 sur la commune de Saint-Claude. Depuis, le PNG et l'ONF ont pris en main cette menace avec des actions de prospection et de lutte sur de nouveaux secteurs de la Basse-Terre. En ce mois de juin 2024, le Parc entamera sa deuxième année de prospection intensive. Le but: détecter la présence potentielle de plans et éviter son installation dans les forêts guadeloupéenne. Un laps de temps de 2 ans est laissé entre chaque opération de lutte pour permettre de mieux localiser les plants qui étaient juvéniles lors de la première opération.

Pendant 12 jours, 5 agents formés du Parc prospecteront pour détecter les zones envahies avec pour mission de localiser les zones infestées en forêt sud Basse-Terre et extraire les individus qui seront alors transportés dans un contenant adapté avant d'être détruits. Un protocole strict de biosécurité s'applique aux agents. La biosécurité permet de prévenir une dissémination involontaire après manipulation de la plante ou après un passage en milieu forestier dense.

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Comment le reconnaître ?

Le miconia est un arbuste pouvant mesurer entre 4 et 12 mètres de haut. Il peut même atteindre 16 mètres pour les individus les plus grands. Il possède de très grandes feuilles opposées pouvant atteindre 80 cm de long sur 50 cm de large, ovales à rondes. L’espèce possède des feuilles à revers pourpre lie-de-vin très caractéristiques. Ses fleurs sont petites et blanches regroupées en inflorescences (appelées "panicules", de 20-30 cm de long).

Il ne faut pas confondre le Miconia calvescence avec d'autres espèces de Miconia local. La présence de trois nervures parallèles de la feuille est caractéristique de ces espèces. Le critère le plus fiable est de regarder la couleur de la face supérieure de la feuille. Il faut qu'elle soit verte foncée et la face intérieure doit être pourpre.

L’arbre effectue 2 à 3 floraisons par an, qui produisent chacune 2 à 3 millions de graines, d’où ses capacités de dispersion phénoménales en forêt tropicale humide qui sont favorisées par des voies de dispersion par les oiseaux, le vent et la pluie. De plus, ses graines peuvent rester en dormance dans le sol jusqu'à 14 ans avant de se développer.
 

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Inflorescence de Miconia calvescens

 

Comment reconnaître l’invasion ?


Elle se traduit par une perte drastique de la biodiversité locale, des boisements forestiers monospécifiques, des sols instables et une perte de l'identité paysagères pour les habitants de la Basse-Terre.

Son invasion est d'ores et déjà établis en Polynésie françaises et en Nouvelle-Calédonie s'accompagnant d'une perte de biodiversité alarmante. Des études estiment qu'entre 40 et 50 espèces de flore endémique de Tahiti sont directement menacés de disparition par l'envahissement de Miconia calvescens (Meyer et Florence, 1996 ).

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Forêt de Miconia Tahiti

Quelle marche à suivre quand on en repère un ?

Si vous pensez avoir repéré un Miconia calvescens, restez le plus possible à distance, vous risqueriez de disséminer des graines et de contribuer à la propagation de l’espèce. Vérifiez la présence de boue sous vos semelles et nettoyez-les au mieux avant de quitter la parcelle. Dès que possible, lavez-les à l’eau de mer pour éliminer tous risques de dissémination involontaire.

En cas d'observation de cette espèce, la démarche à suivre est la suivante :

  • Prise du point GPS ou la localisation de la zone,

  • Une photo pour aider à l'identification de l'espèce

  • Transmettre l'information au Parc national de la Guadeloupe ou à l'ONF.

Camille Peltier
 

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1. tiges légèrement pubescentes, feuilles opposées 5-nervées avec trois nervures proéminentes, et inflorescence terminale (x 1/3) ; 2. bouton floral au calice recouvert d’une pubescence étoilée (x 13) ; 3. pétale ovale blanc à nervation palmée (x 13) ; 4. fleur épanouie 5-mère au style proéminent et avec 10 étamines (x 13) ; 5. coupe longitudinale d’une fleur épanouie (x 13) ; 6. coupe transversale de l’ovaire (x 13) ; 7. anthère au pore apical et avec de petites glandes basales, au stade bouton floral a) et au stade de fleur épanouie b) ; 8. baie charnue noire à maturité (x 10) ; 9. graines pourvues d’un tégument coriace (x 65) (Dessin : A. DETTLOFF)

Biblio :

Meyer, J.-Y., & Florence, J. (1996). Tahiti’s Native Flora Endangered by the Invasion of Miconia calvescens DC. (Melastomataceae). Journal of Biogeography, 23(6), 775–781. http://www.jstor.org/stable/2846003

Lowe S., Browne M., Boudjelas S., De Poorter M. (2000) 100 of the World’s Worst Invasive Alien Species A selection from the Global Invasive Species Database. Published by The Invasive Species Specialist Group (ISSG) a specialist group of the Species Survival Commission (SSC) of the World Conservation Union (IUCN), 12pp. First published as special lift-out in Aliens 12, December 2000. Updated and reprinted version: November 2004.

https://especes-envahissantes-outremer.fr/invasion-miconia-martinique-guadeloupe/

https://www.guadeloupe.developpement-durable.gouv.fr/le-miconia-calvescens-a3134.html