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L’archipel guadeloupéen fait partie intégrante d’un "point chaud" de la biodiversité mondiale: la Caraïbe. On y retrouve une biodiversité exceptionnelle mais menacée. Raison pour laquelle il est nécessaire de mieux appréhender cette biodiversité qui doit être préservée.

L’Agence Régionale de la Biodiversité des Îles de Guadeloupe (ARB-IG) et le Muséum national d’Histoire Naturelle (MNHN) ont bâti le projet d’expédition scientifique "La Planète Revisitée des Îles de Guadeloupe" (LPRIG) qui doit permettre d’acquérir de la donnée scientifique sur la biodiversité dite "négligée" (mousses, champignons, petits invertébrés…) des îles du sud de l’archipel (la Désirade, Marie-Galante et les Saintes).

Cette nouvelle campagne décomposée en deux volets (terrestre et marin) vient à la suite de deux expéditions marines menées par le Parc national de la Guadeloupe en étroite collaboration avec le MNHN et l’Université des Antilles, Karubenthos 1 en 2012 et Karubenthos 2 en 2015. Elles ont permis la découverte de plus de 300 nouvelles espèces.

Mission Karubentos - MNHN

Nous vous proposons, quelques jours avant le lancement de l’expédition "la Planète Revisitée des Îles de Guadeloupe" de revenir sur ces missions qui ont permis de dresser l’inventaire le plus approfondi jamais réalisé dans la Caraïbe, avec des résultats exceptionnels sur les mollusques, les crustacés et les algues.

En moins de 30 ans, le nombre d’espèces décrites à la surface de la planète est passé de 1,5 à 2 millions d’espèces. Il reste sans doute aujourd’hui entre 8 et 20 millions d’espèces à découvrir, dont un quart, voire la moitié, pourrait disparaître d’ici le milieu ou la fin du siècle.

Les forêts tropicales, les récifs coralliens et les grands fonds océaniques sont reconnus comme étant les principaux réservoirs d’espèce: on estime que 40 % des espèces marines vivent dans les zones côtières tropicales.
 

Karubenthos, récolte - MNHN

Des expéditions qui s’insèrent dans les missions du Parc


Accélérer l’exploration et la description des espèces dans les régions du globe les plus riches en biodiversité, mais jusqu’ici insuffisamment inventoriées, est donc une priorité. C’est dans ce cadre que s’inscrivent les grandes expéditions naturalistes.

Le projet Karubenthos 1, réalisé en 2012, et le projet Karubenthos 2, réalisé en 2015, aussi appelé "Karudeep", sont le fruit d’une collaboration menée par le Muséum national d’Histoire naturelle (MNHN), le Parc national de la Guadeloupe (PNG) et l’Université des Antilles et de la Guyane pour précisément combler cette lacune, en inventoriant les algues et invertébrés marins de Guadeloupe.

Le Parc national de la Guadeloupe a pour mission la protection de la biodiversité et du territoire sous sa gestion. Et on ne peut protéger que ce qui est connu. C’est pourquoi il est nécessaire de recenser, d'inventorier et d'étudier les espèces biologiques constituant la richesse de notre territoire.

Le bassin caribéen fait partie des 36 "hot spots" de biodiversité à l'échelle mondiale. Ce sont des régions du monde qui abritent un grand nombre d'espèces uniques et menacées. La Guadeloupe est un grand réservoir de biodiversité avec un fort taux d'endémisme, appartenant à ce "hot spot" qu'il convient de protéger.

C’est dans les forêts tropicales et les fonds marins tropicaux que l’on retrouve le plus d’espèces. Cependant, si les espèces les plus emblématiques du milieu marin, comme les poissons et les coraux, sont bien connus, il n’en va pas de même pour les compartiments du "petit benthos" (ensemble des petits organismes vivant sur les fonds marins).

L'expédition Karubenthos 1 est une initiative du Parc national de la Guadeloupe, mise en œuvre par le Muséum national d'Histoire naturelle (MNHN) en collaboration avec l'Université des Antilles (UA) et l'Université Pierre et Marie Curie (UPMC).

L'objectif de cette mission était de réaliser un inventaire du petit benthos (faune du fond des océans). Cet inventaire a permis de dresser un état initial du milieu marin benthique guadeloupéen. Grâce au projet Karubenthos 2012, le Parc dispose d’un état de référence sur lequel fonder ses actions de conservation et de gestion.

La première partie de l'expédition s'est déroulée du 2 au 30 mai 2012, puis du 3 au 14 décembre 2012. Elle a mobilisé sur place une cinquantaine de participants (chercheurs, techniciens, stagiaires, amateurs de haut niveau), principalement de la région caraïbe, réunissant 8 nationalités différentes.

Espèces découvertes MNHN


Pour quels résultats ?
 

Les périodes de terrain et d'échantillonnage se sont succédé avec des phases de tri en laboratoire impliquant une quarantaine de personnes.

À ce jour, Karubenthos 1 a permis la description de 94 nouvelles espèces de mollusques et une nouvelle espèce de crustacé.

Les 272 opérations de collecte d'échantillons ont permis de recenser plus de 2 000 espèces:

  •     1 200 espèces de mollusques (famille du lambis, huîtres, moules,...),
  •     300 espèces d'algues,
  •     400 espèces de crustacés (famille du crabe blanc, crabe sémafot,...).
  •     90 espèces d’échinoderme (famille des étoiles de mers,...)

Pour Karubenthos 2, 223 nouvelles espèces de ont été identifiées dont 176 de mollusques. Bien que les fonds marins escarpés de la Guadeloupe soient difficiles à échantillonner avec des engins de collecte profond, les résultats obtenus lors des 143 opérations de collectes démontrent une très grande diversité d'espèces présentes, similaire à celle de l'Indo-Pacifique.

Quelques autres chiffres clés de l'expédition Karubenthos 2 :

  •     29 dragages
  •     113 chalutages
  •     144 stations de collecte

Ces résultats sont extrêmement précieux pour la découverte et la connaissance du territoire, de sa flore et de sa faune marine. Au-delà des nouvelles découvertes d'espèces, ces données d'occurrences permettent une meilleure connaissance et description des spécimens déjà connus de la science.

Au total, avec les deux missions, ce sont 318 nouvelles espèces qui ont été découvertes.
 

Laboratoire installé Université des Antilles - Karubenthos


Comment se déroule ce genre de mission ?
 

Pour la première mission, la phase de collecte des échantillons s'est déroulée sur 197 stations (points GPS), à des profondeurs allant de 0 à 250 mètres. Ce sont alors 272 opérations de collecte qui ont eu lieu à l'aide de différentes méthodes pour prendre en compte chaque habitat:

  • Les pêcheurs à pied : Ils échantillonnent algues et invertébrés sur la partie littorale.
  • Les récolteurs à vue : Ce sont des plongeurs qui observent les tombants, herbiers et fonds sédimentaires, à la recherche d’espèces fragiles et/ou dispersées dans le milieu.
  • Les brosseurs-suceurs : Les plongeurs utilisent une suceuse pour aspirer le petit macrobenthos réfugié dans les creux et interstices des rochers, mais aussi dans les fonds meubles. Ils nettoient aussi les blocs et débris coralliens avec des brosses afin de récolter la faune ou flore fixées et les petits animaux se déplaçant sur le fond.
  • Les dragueurs et poseurs de nasses : Ces techniques permettent d’échantillonner et de collecter des espèces non accessibles aux équipes de plongeurs. La drague est utilisée dans les fonds meubles et est déployée jusqu’à 200 m de profondeur. Les nasses appâtées permettent la capture de petits carnivores et charognards.

Les échantillons ont été ramenés au laboratoire hébergé par le laboratoire de biologie marine de l'Université des Antilles pour être triés, photographiés et analysés.

L'expédition Karubenthos 2, appelée aussi "KARUDEEP" est à l'initiative du Muséum national d'Histoire naturelle en partenariat avec le Parc national de la Guadeloupe, l'Université des Antilles, le sanctuaire AGOA, l'Institut de Recherche pour le Développement (IRD) et l'Institut Écologie et Environnement du CNRS. Cette campagne de terrain a également eu lieu dans le contexte du programme Tropical Deep-Sea Benthos, dédié à l'exploration de la faune benthique tropicale en zones profondes.

L'objectif de cette seconde campagne était de réaliser l'inventaire du benthos profond de la zone économique exclusive (ZEE) de la Guadeloupe, de 50 à 900 mètres de profondeur. L’exploration de la zone profonde « Caraïbes » a connu son Âge d’Or dans les dernières décennies du 19ème siècle. Peu d’explorations de la faune profonde ont eu lieu depuis les grandes expéditions naturalistes de l’Albatross (1883-1900) et du Blake (1877-1880) qui ont exploré la zone des Caraïbes et plus particulièrement les Antilles Françaises. Depuis lors, faute de moyens dédiés et peut-être aussi faute de mobilisation de la communauté scientifique, la région est restée à l’écart des grands programmes d’inventaires des faunes profondes.

Il était donc nécessaire, pour poursuivre l'exploration des profondeurs de Karubenthos 1, de mettre en œuvre une nouvelle campagne d'exploration en mer.

La mission "Karudeep" s'est déroulée du 6 au 30 juin 2015 à bord de l'Antéa, un catamaran de recherche océanographique mis à disposition par l'Institut de Recherche pour le Développement (IRD). L'équipe était composée de 32 scientifiques et membres d'équipage. Les sites échantillonnés lors de cette campagne ont été sélectionnés en fonction de leur topographie intéressante (monts sous-marins, pentes, bancs).

La phase de collecte des échantillons s'est déroulée sur 3 zones, à des profondeurs allant de 50 à 900 mètres. Les méthodes utilisées durant cette mission étaient, le chalutage pour les fonds meubles et le dragage pour les fonds rocheux. Au total, 143 prélèvements ont été effectuées.

Les échantillons ont été photographiés, échantillonnés et triés directement à bord de l'Antéa lors de cette expédition.

Rendez-vous donc vendredi 27 septembre pour le lancement de ce qu'on pourrait appeler le 3ème volet de Karubenthos, "La Planète Revisitée des Îles de Guadeloupe" de L’Agence Régionale de la Biodiversité des Îles de Guadeloupe. Expédition dont le Parc national de la Guadeloupe est bien sûr partenaire. 

 


Source URL: https://guadeloupe-parcnational.fr/actualites/cest-quoi-au-fait-les-missions-karubenthos